Des prairies

 La prairie un écosystème parmi tant d’autres…
Extraits de Biomimétisme Janine M. Benyus.


… Des champs de blés se dressent de tous côtés, à perte de vue, rangées rectilignes faisant alterner le vert et le marron. Du ciel, ils doivent donner l’impression d’avoir été taillés par une machine de mort, tant leurs bords forment des angles impossibles à retrouver dans le vivant. Entre les tiges, le sol est clairement visible, la moindre mauvaise herbe ayant été pulvérisée de produits chimiques. Rein d’autre que le blé n’est autorisé à pousser ici ; toute forme de diversité a été arrachée.

…. Aujourd’hui, nos cultures sont si dépourvues de la capacité d’adaptation de leurs ancêtres sauvages qu’elles ne peuvent se passer de nous et de nos transfusions pétrochimiques d’engrais et de pesticides. Dans notre quête d’une production toujours plus importante, nous leurs avons ôté leurs défenses naturelles. Nous les avons isolées de leur groupe plurispécifique, nous avons restreint leur diversité génétique et privé leur sol de sa santé.



Sur le bord de la route, un panneau indique The Wauhob : une prairie qui a miraculeusement échappé au labour, probablement parce qu’elle était en pente, et qu’il était difficile d’y faire venir des charrues. Je ralentis, puis arrête complètement de rouler, bouche bée devant ce spectacle d’autant plus remarquable qu’il fait suite à des hectares d’une régularité implacable. D’où je suis, j’aperçois à la fois les champs de blé et la prairie, et j’ai l’impression d’être devant une parabole visuelle, celle de Jacob et d’Esaü, issus du même moule mais de caractères très différent. D’un côté, une volonté imposée, de l’autre, la volonté de la terre.


Piper parle des plantes comme il parlerait de ses voisines au sein d’une communauté, tandis qu’il me présente les espèces fixatrices d’azote, celles dont les racines s’enfoncent dans le sol pour y puiser l’eau, celles qui, au printemps, se dépêchent de pousser pour faire de l’ombre aux mauvaises herbes, celles qui résistent aux ravageurs, ou abritent ces héros que sont les insectes utiles. Il me signale également les papillons et les abeilles, pollinisateurs aux langues agiles qui répandent des rumeurs d’une plante à une autre.

Sous cette foule incontrôlée se cache 70% du poids vif de la prairie, un épais tissu de racines, de radicelles et de stolons qui captent l’eau et pompent les nutriments des profondeurs.


Le secret de la prairie réside dans sa capacité à maintenir les deux assemblages –en surface, et sous la surface de la terre- dans un état de stabilité dynamique.  

Janine M. Benyus.

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